Monday, August 30, 2010

Page 289

• Il est besoin maintenant de mettre en évidence la connexion entre les résultats de l’analyse ontologique et les expériences quotidiennes de la conscience.

§ 59. L’interprétation existentiale de la conscience et l’explicitation vulgaire de la conscience.

• La conscience est l’appel du souci, venu de l’étrang(èr)eté de l’être-au-monde, qui convoque le Dasein à son pouvoir-être-en-dette le plus propre.
• Le comprendre de l’ad-vocation (Anruf) est le vouloir-avoir-conscience.
• Ces déterminations semblent contredire l’interprétation vulgaire de la conscience, laquelle s’en tient à ce que l’on connaît au titre de conscience.

• La quotidienneté envisage le Dasein comme un étant à-portée-de-la-main offert à la préoccupation : la vie est une affaire (Geschäft).

• D’un part, l’interprétation vulgaire de la conscience ne saurait valoir comme critère ultime de l’« objectivité » d’une analyse ontologique.
• D’autre part, celle-ci n’a pas le droit de s’élever au-dessus de la compréhension quotidienne de la conscience et de passer à côté des théories anthropologiques, psychologiques et théologiques de la conscience fondées sur elle.

Sartre, L'être transphénoménal des phénomènes.

Sartre, L’Etre et le Néant,
Introduction: A la recherche de l'être.

II- Le phénomène d’être et l’être du phénomène.
pp.15-6.
« En considérant non l'être comme condition du dévoilement, mais l'être comme apparition qui peut être fixée en concepts, nous avons compris tout d'abord que la connaissance ne [16] pouvait à elle seule rendre raison de l'être, c'est-à-dire que l'être du phénomène ne pouvait se réduire au phénomène d'être. En un mot, le phénomène d'être est « ontologique » au sens où l'on appelle ontologique la preuve de saint Anselme et de Descartes. Il est un appel d'être; il exige, en tant que phénomène, un fondement qui soit transphénoménal. Le phénomène d'être exige la transphénoménalité de l'être. Cela ne veut pas dire que l'être se trouve caché derrière les phénomènes (nous avons vu que le phénomène ne peut pas masquer l'être) - ni que le phénomène soit une apparence qui renvoie à un être distinct (c'est en tant qu'apparence que le phénomène est, c'est-à-dire qu'il s'indique sur le fondement de l'être). Ce qui est impliqué par les considérations qui précèdent, c'est que l'être du phénomène, quoique coextensif au phénomène, doit échapper à la condition phénoménale - qui est de n'exister que pour autant qu'on se révèle
- et que, par conséquent, il déborde et fonde la connaissance qu'on en prend. »

III - Le cogito « préréflexif » et l’être du « percipere ».
p.17.
« l'être-fondement du percipere et du percipi doit échapper lui-même au percipi: il doit être transphénoménal. Nous revenons à notre point de départ. Toutefois on peut nous accorder que le percipi renvoie à un être qui échappe aux lois de l’apparition, mais tout en maintenant que cet être transphénoménal est l'être du sujet. Ainsi le percipi renverrait au percipiens - le connu à la connaissance et celle-ci à l'être connaissant en tant qu'il est, non en tant qu'il est connu, c'est-à-dire à la conscience. C'est ce qu'a compris Husserl : car si le noème est pour lui un corrélatif irréel de la noèse, dont la loi ontologique est le percipi, la noèse, au contraire, lui apparaît comme la réalité, dont la caractéristique principale est de se donner à la réflexion qui la connaît, comme « ayant été déjà là avant ». Car la loi d'être du sujet connaissant, c'est d'être-conscient. La conscience n'est pas un mode de connaissance particulier, appelé sens intime ou connaissance de soi, c'est la dimension d'être transphénoménale du sujet. »

IV - L’être du « percipi ».
pp.23-4.
« Le « percipi » nous a renvoyé à un « percipiens », dont l'être s'est révélé à nous comme conscience. Ainsi aurions-nous atteint le fondement ontologique de la connaissance, l'être premier à qui toutes les autres apparitions apparaissent, l'absolu par rapport à quoi tout phénomène est relatif. Ce n’est point le sujet, au sens kantien du terme, mais c'est la subjectivité même, l'immanence de soi à soi. Dès à présent, nous avons échappé à l'idéalisme : pour celui-ci l'être est mesuré par la connaissance, ce qui le soumet à la loi de dualité ; il n'y a d'être que connu, s'agît-il de la pensée même : la pensée ne s'apparaît qu'à travers ses propres produits, c'est-à-dire que nous ne la saisissons jamais que comme la signification des pensées faites ; et le philosophe en quête de la pensée doit interroger les sciences constituées pour l'en tirer, à titre de condition de leur possibilité. Nous avons saisi, au contraire, un être qui échappe à la connaissance et qui la fonde, une pensée qui ne se donne point comme représentation ou comme signification des pensées exprimées, mais qui est directement saisie en tant qu'elle est - et ce mode de saisissement n'est pas un phénomène de connaissance, mais c'est la structure de l’être. Nous nous trouvons à présent sur le terrain de la phénoménologie husserlienne, bien que Husserl [24] lui-même n'ait pas toujours été fidèle à son intuition première. Sommes-nous satisfait? Nous avons rencontré un être transphénoménal, mais est-ce bien l'être auquel renvoyait le phénomène d'être, est-ce bien l'être du phénomène ? Autrement dit l'être de la conscience suffit-il à fonder l'être de l'apparence en tant qu'apparence ? Nous avons arraché son être au phénomène pour le donner à la conscience, et nous comptions qu'elle le lui restituerait ensuite. Le pourra-t-elle ? »

p.24
« En tant, donc, que le connu ne peut se résorber dans la connaissance, il faut lui reconnaître un être. Cet être, nous dit-on, c'est le percipi. Reconnaissons tout d'abord que l'être du percipi ne peut se réduire à celui du percipiens - c'est-à-dire à la conscience - pas plus que la table ne se réduit à la liaison des représentations. »

p.26
« L'esse du phénomène ne saurait être son percipi. L'être transphénoménal de la conscience ne saurait fonder l'être transphénoménal du phénomène. »

V - La preuve ontologique.
p.26
« nous croyions être dispensé d'accorder la transphénoménalité à l'être du phénomène, parce que nous avons découvert la transphénoménalité de l'être de la conscience. Nous allons voir, tout au contraire, que cette transphénoménalité même exige celle de l'être du phénomène. »

p.29
« Il est bien entendu que cet être [autre que la conscience et impliqué par elle] n'est autre que l'être transphénoménal des phénomènes et non un être nouménal qui se cacherait derrière eux. C'est l'être de cette table, de ce paquet de tabac, de la lampe, plus généralement l'être du monde qui est impliqué par la conscience. Elle exige simplement que l'être de ce qui apparaît n'existe pas seulement en tant qu'il apparaît. L'être transphénoménal de ce qui est pour la conscience est lui-même en soi. »

Page 288

• Avec ce choix (Wahl), le Dasein se rend possible son être-en-dette le plus propre.
• L’entente (Verständigkeit) du On ne connaît que des infractions contre la norme publique et se dérobe à l’être-en-dette le plus propre, afin de commenter les fautes commises.
• Dans l’ad-vocation, le On est ad-voqué à l’être-en-dette le plus propre.
• La compréhension de l’appel est le choisir (Wählen).
• La conscience ne peut être choisie : ce qui est choisi, c’est l’avoir-conscience en tant qu’être-libre pour l’être-en-dette le plus propre.
Comprendre l’ad-vocation signifie : vouloir-avoir-conscience.

• Cela ne veut pas dire vouloir avoir une bonne conscience, mais la disponibilité à l’être-ad-voqué (Angerufenwerden).
• Le vouloir-avoir-conscience est tout aussi éloigné d’une recherche de responsabilités factices que de la tendance à une libération (Befreiung) à l’égard de la dette.

Le vouloir-avoir-conscience est la présupposition existentielle de la possibilité du devenir-en-dette factice.
• Comprenant l’appel, le Dasein laisse le Soi-même le plus propre agir sur soi à partir du pouvoir-être qu’il a choisi.
• Ainsi seulement peut-il être responsable.
• Tout agir (Handeln) est sans conscience (gewissenlos) parce que, sur le fondement nul de son projeter nul, il est devenu en dette auprès des autres.
• Le vouloir-avoir-conscience devient assomption de l’inconscience (Gewissenlosigkeit) à l’intérieur de laquelle subsiste la possibilité existentielle d’être bon.

• L’appel n’est pas seulement critique, mais positif, il ouvre le pouvoir-être le plus originaire en tant qu’être-en-dette.
• La conscience se manifeste comme une attestation (Bezeugung) qui appelle le Dasein devant son pouvoir-être le plus propre.

Sunday, August 29, 2010

Sartre (EN): La conscience implique dans son être un être non conscient et transphénoménal

Sartre, L’Etre et le Néant,
Introduction: A la recherche de l'être.
V- La preuve ontologique.
pp28-9.

La conscience est un être dont l'existence pose l'essence, et, inversement, elle est conscience d'un être dont l'essence implique l'existence , c'est-à-dire dont l'apparence réclame d'être. L'être est partout. Certes, nous pourrions appliquer à la conscience la [29] définition que Heidegger réserve au Dasein et dire qu'elle est un être pour lequel il est dans son être question de son être , mais il faudrait la compléter et la formuler à peu près ainsi : la conscience est un être pour lequel il est dans son être question de son être en tant que cet être implique un être autre que lui.
Il est bien entendu que cet être n'est autre que l'être transphénoménal des phénomènes et non un être nouménal qui se cacherait derrière eux. C'est l'être de cette table, de ce paquet de tabac, de la lampe, plus généralement l'être du monde qui est impliqué par la conscience. Elle exige simplement que l'être de ce qui apparaît n'existe pas seulement en tant qu'il apparaît. L'être transphénoménal de ce qui est pour la conscience est lui-même en soi.

Résumé p.288 [vouloir-avoir-conscience]

.se choisissant lui-même, le Dasein se rend possible son être-en-dette le plus propre, qui demeure refermé au On-même.

.le On décompte des infractions contre la règle courante et la norme publique.
.il s’est dérobé à l’être-en-dette le plus propre.

.la compréhension de l’appel est le choisir.
.pas le choisir de la conscience qui ne peut être choisie.
.choisir l’avoir-conscience en tant qu’être-libre pour l’être-en-dette le plus propre.

.comprendre d’ad-vocation
= vouloir-avoir-conscience.
≠ vouloir avoir bonne conscience.
≠ culte volontairement rendu à l’appel.
= disponibilité à l’être-ad-voqué.
≠ recherche de responsabilités factices
= présupposition existentielle la plus originaire de la possibilité du devenir-en-dette factice.

.comprenant l’appel, le Dasein laisse le soi-même le plus propre agir sur soi à partir du pouvoir-être qu’il a choisi.

.tout agir, facticement, est nécessairement « in-conscient »
..parce qu’il n’évite pas l’endettement moral factice,
..parce qu’il est toujours déjà devenu en dette auprès des autres.
.le vouloir-avoir-conscience devient assomption de l’inconscience essentielle à l’intérieur de laquelle seulement subsiste la possibilité existentielle d’être « bon ».

.la conscience se manifeste comme une attestation appartenant à l’être du Dasein.

.détermination existentiale du pouvoir-être authentique ainsi attesté ?
.le phénomène de la conscience se laisse-t-il reconnaitre comme il est « effectivement » ?
.ne nous sommes-nous pas bornés à déduire avec une franchise excessive une idée de la conscience de la constitution d’être du Dasein ?

.dernière étape de l’interprétation :
..délimitation existentiale du pouvoir-être authentique attesté dans la conscience, accessible même à la compréhension vulgaire de la conscience.
..mise en évidence de la connexion entre les résultats de l’analyse ontologique et les expériences quotidiennes de la conscience.

Friday, August 27, 2010

Summary of page 287

• L’étrang(èr)eté transporte le Dasein devant sa nullité.
• Dans la mesure où il y va pour le Dasein comme souci de son être, il se convoque depuis l’on factice-écheant à son pouvoir-être depuis l’étrang(èr)eté.
• L’appel pro-voque à la possibilité d’assumer en existant l’être-jeté comme fondement nul (nichtigen Grund).
• Le rappel pro-vocant (vorrufende Rückruf) de la conscience (Gewissen) donne au Dasein à comprendre qu’il doit, à titre de fondement nul de son projet nul, se ramener de la perte (Verlorenheit) dans le On vers lui-même, i.e. qu’il est en-dette.

• L’endettement résultant d’une action est un concept dérivé différent de l’être-en-dette au sens existential.
• L’appel de la conscience, provenant du Dasein, se dirige uniquement à cet étant.
• Le con-voquer (Aufrufen) à l’être-en-dette signifie un pro-voquer (Vorrufen) au pouvoir-être que je suis à chaque fois déjà.
• Au lieu de se charger d’une « dette » à cause de manquements (Verfehlungen), le Dasein doit être authentiquement l’en-dette comme lequel il est.

• L’entendre correct de l’appel équivaut au se-projeter (Sichentwerfen) vers le pouvoir-devenir-en-dette (Schuldigwerdenkönnen) authentique.
• Le se-laisser-pro-voquer (Sichvorrufenlassen) à cette possibilité inclut en soi le devenir-libre (Freiwerden) pour l’appel : la disposition (Bereitschaft) au pouvoir-être-ad-voqué (Angerufenwerdenkönnen).
• Le Dasein, comprenant l’appel, est obédient (hörig) à sa possibilité la plus propre d’existence.
• Il s’est lui-même choisi (gewählt).

Résumé p.287

.l’étrang(èr)eté transporte le Dasein devant sa nullité non dissimulée.
.le Dasein se convoque lui-même – en tant que On factice-échéant – à son pouvoir-être.
.l’appel est rappel qui pro-voque :
..provoque à la possibilité d’assumer soi-même en existant l’étant jeté qu’il est.
..rappel à l’être-jeté, afin de comprendre celui-ci comme le fondement nul qu’il a à assumer dans l’existence.
.le rappel provoquant de la conscience donne au Dasein à comprendre qu’il doit se ramener de la perte dans le On vers lui-même : qu’il est en-dette.
.prise de connaissance du en-dette.

.l’appel provient du Dasein lui-même et se dirige uniquement vers cet étant.
.le con-voquer à l’être en dette = pro-voquer au pouvoir-être que je suis à chaque fois déjà en tant que Dasein.
.être authentiquement le « en-dette ».

.l’entendre correct de l’appel = se-comprendre en son pouvoir-être le plus propre = se-projeter vers le pouvoir-devenir-en-dette authentique le plus propre.
.le se-laisser-pro-voquer inclut le devenir-libre pour l’appel : disposition au pouvoir-être-ad-voqué.
.obédience à sa possibilité la plus propre d’existence.
.il s’est lui-même choisi [??].

Thursday, August 26, 2010

Résumé p.286

.est-il évident que tout ne-pas signifie un négatif au sens d’un défaut ?
.trouver l’origine ontologique de la néantité dans la clarification thématique du sens de l’être en général.

.les concepts de privation et de défaut manifestent leur insuffisance à interpréter ontologiquement le phénomène de la dette en s’orientant sur l’idée du mal, si le bonum comme sa privatio tiennent leur origine commune de l’ontologie du sous-la-main.

.l’étant dont l’être est le souci peut se charger d’une dette factice.
.il est en-dette au fond de son être.
.cet être-en-dette essentiel est cooriginairement la condition existentiale de possibilité de la moralité et de ses modifications facticement possibles.

.quelle expérience plaide en faveur de cet être-en-dette originaire du Dasein ?
.la dette n’est-elle là que si la conscience de dette s’est éveillée, ou bien le fait même que la dette sommeille n’annonce-t-il pas justement l’être-en-dette originaire ?

.l’être-en-dette originaire, de prime abord et le plus souvent, demeure non-ouvert, il est tenu refermé par l’être échéant du Dasein.
.cela ne fait que dévoiler la nullité citée.
.l’être-en-dette est plus originaire que tout savoir le concernant.
.c’est seulement parce que le Dasein est en-dette, et, en tant qu’échéant et jeté, se le referme à lui-même, que la conscience est possible
.l’appel donne fondamentalement cet être-en-dette à comprendre.

.l’appel est appel du souci.
.dans l’étrang(èr)eté, le Dasein se rassemble originairement avec lui-même.

Résumé p.285

.c’est en tant qu’être-soi-même que le Dasein est l’être du fondement.

.le Dasein est en existant son fondement.
.il se comprend à partir de possibilités.
.il est l’étant jeté.
.il se tient à chaque fois dans l’une ou l’autre possibilité.
.il a renoncé à une autre.

.le projet est déterminé par la nullité de l’être fondement.
.en tant que projet, il est lui-même essentiellement nul.

.être-libre du Dasein pour ses possibilités existentielles.
.la liberté n’est que dans le choix de l’une, dans le ne-pas-pouvoir-avoir-choisi l’autre.

.dans la structure de l’être-jeté et dans celle du projet est essentiellement contenue une nullité.
.cette nullité est le fondement de la nullité du Dasein inauthentique dans l’échéance.
.le souci est transi de part en part de nullité.
.la nullité existentiale n’a nullement le caractère d’une privation, d’un défaut par rapport à un idéal.
.avant tout ce qu’il peut projeter et atteindre, l’être du Dasein est déjà nul en tant que projeter.
.cette nullité n’est pas une qualité obscure qu’il pourrait, à condition de progresser suffisamment, éliminer.

Wednesday, August 25, 2010

Marc Richir sur la p.284

Richir, M. (2004) Phantasia, imagination, affectivité. Phénoménolgie et anthropologie phénoménologique. Editions Jérôme Millon (pp.165-9)

L’appelant de l’appel est le Dasein dans son Unheimlichkeit, tel qu’il se trouve dans la situation de l’angoisse, comme pur et nu « que » dans le néant du monde. Le Dasein « à hauteur de mort », comme pouvoir-être transmué par le pouvoir-ne-pas être, en un soi qui aiguillonne, inquiète, dans l’appel, le soi factice toujours déjà jeté dans l’une ou l’autre possibilité factice d’exister.
Toujours déjà jeté, facticement, dans l’une ou l’autre de ses possibilités factices d’exister, le Dasein se trouve du même coup toujours en dette de lui-même, surplombé par lui-même en suspens dans sa possibilité la plus propre : c’est ce qu’atteste facticement, donc existentiellement, la structure de l’appel dans le Gewissen. Mais il reste à voir comment cela se fait existentialement, c’est-à-dire comment il est possible de « concevoir existentialement la dette ».
Nous commençons à toucher à la double ipséité du Dasein.
La facticité (l’être toujours déjà jeté au monde) lui appartient quoiqu’elle ne l’amène pas à son « là », c’est-à-dire à cette figure étrangère (unheimlich) de lui-même en tant que pouvoir-être suspendu « à hauteur de mort ».
Le Dasein ne peut jamais reprendre cette contingence (cet être-jeté) pour le conduire dans le « là » du Dasein, donc de lui-même en tant que pur pouvoir-être suspendu.
La détermination factice de l’existence n’est pas un évènement qui le fonderait, une sorte de passage à l’acte ayant eu lieu du pouvoir-être comme puissance, passage factuel, donc contingent. Il ne se passe rien dans le Dasein proprement dit. Il n’est que son « que », c’est-à-dire le pur fait de sa certitude factice d’exister, répondant à la certitude indéterminée de la mort. Soi factice de l’être-jeté ou du projet.
Un autre « soi » pointe l’oreille, avec l’introduction du fondement : le Dasein est aussi le fondement de son pouvoir-être, donc la racine ou le sol de sa positivité. Sol qui excède le soi factice pris dans son existence, et que celui-ci tire comme un fardeau qui l’alourdit.
Distinction entre le sens d’être comme exister (telle ou telle possibilité factice) et le sens d’être comme fondement. C’est dans le pur et simple fait d’exister (où il ne se passe rien) que le Dasein est le fondement de son pouvoir-être, et cela sans qu’il ne l’ait jamais posé, ce pourquoi le fondement est le fardeau de l’existence.
Le projet, c’est-à-dire les possibilités factices d’exister ne peuvent être que les possibilités déjà jetées, c’est-à-dire la contingence du contenu de l’exister. Il est donc impossible pour le Dasein de maîtriser ce qui est censé, comme pur pouvoir-être, être au fondement de ces possibilités factices d’exister. Il ne reste plus au Dasein qu’à assumer l’être-fondement qui lui échappe radicalement parce qu’il l’a toujours déjà précédé dans le jet (projet) des possibilités factices d’exister où il se reconnait facticement.
C’est en étant (toujours déjà) jeté (dans l’une ou l’autre possibilité factice d’exister) que le Dasein est (paradoxalement) fondement. C’est donc à la fois parce qu’il est toujours déjà jeté dans telle possibilité factice d’exister et parce que c’est de cette manière qu’il est fondement qu’il « reste en arrière » de ses possibilités factices d’exister qui, de la sorte, le précèdent toujours déjà. Dire que c’est de cette manière qu’il est son fondement, c’est dire qu’il ne peut pas être avant (et face à) lui, mais, chaque fois qu’il existe dans le jet de telle possibilité factice d’exister, à partir de lui en tant que le fondement de cette possibilité. Le Dasein ne peut donc jamais s’assurer de son fondement, toujours déjà passé dans telle ou telle possibilité factice d’exister, donc ne peut jamais être maître de son être le plus propre qui correspondrait à l’exister dans toutes les possibilités factices d’exister. L’exister factice vient toujours déjà trop tard.
S’il n’y a pas d’autre manière pour le Dasein d’être-fondement que l’exister factice (l’être-jeté) dans telle possibilité factice d’exister d’où le fondement comme être total se retire, le Dasein n’y est jamais que « néantité de soi-même ».
L’être du Dasein comme exister factice (existentiel), c’est-à-dire aussi l’être soi-même dans la certitude factice d’exister, est « être » comme « non-être » (mode négatif de l’être) du fondement. Nous somme au bord du non-sens puisque c’est par le retrait de l’être du fondement que, par une sorte de creusement pour le non-être ou le néant, le Dasein arrive à exister (à être) dans une sorte de réflexivité de soi (d’ipséité) du néant. Comme si l’exister n’était que de ne pas exister parce qu’il n’est jamais que l’exister d’un Autre (le fondement) qui lui échappe radicalement, et qui l’abandonne, le « délaisse » sur la plage du monde.
[plutôt : le fondement serait une vague qui se « délaisse » sur une plage du monde (particulière, contingente) pour exister facticement. L’exister ne serait que ce délaissement par lequel le fondement est autant qu’il n’est pas. dl].
Pour le fondement, la seule manière d’être est négative. C’est seulement dans l’être-soi du Dasein toujours déjà jeté dans telle ou telle possibilité factice d’exister qu’est le fondement, sur le mode de son retrait qui fait de cet être-soi une néantité de soi-même, dont le Dasein a pourtant à assumer la puissance corrosive.
Distinction entre exister et être que Heidegger subsume par la différence entre le factice-existentiel-ontique et l’ontologique-existential, ce dernier anéantissant le premier. L’être du fondement est tout dans son non-être actif au sein de l’existence factice.

Résumé p.284

.le fondement n’a pas besoin de ne tenir sa nullité que de ce qu’il fonde.
.l’être-en-dette ne résulte pas d’abord d’un endettement mais inversement l’endettement ne devient possible que « sur le fondement » d’un être-en-dette originaire.

.l’être du Dasein est le souci.

.facticité (être-jeté)
.existence (projet)
.échéance

.étant, le Dasein est jeté = il n’est pas porté à son Là par lui-même [brought into its there not of its own accord].
.étant, le Dasein est déterminé comme un pouvoir-être [potentiality of being] qui s’appartient à lui-même, et qui pourtant ne s’est pas remis en propre comme lui-même [has not given itself to itself].
.existant, le Dasein ne passe jamais derrière son être-jeté [never gets back behind its throwness], il ne peut libérer qu’à partir de son être-soi-même, et ne peut conduire au Là que ce qu’il est et a à être. [could never expressly release this « that-it-is-and-has-to-be » from its being a self and lead it into the there]

.l’être-jeté ne se trouve pas derrière le Dasein comme un évènement factuellement arrivé [throwness does not lie behind it as an event which actually occurred, something that happened to it and was again separated from Dasein].
.l’être-jeté ne se produit pas en même temps que le Dasein.
.le Dasein en tant que souci est son « que » [Dasein is constantly its « that » as care].

.remise du Dasein à cet étant qu’il est [delivered over to this being].
.par cette remise, le Dasein est le fondement de son pouvoir-être [the ground of its potentiality-of-being].
.le Dasein n’a pas lui-même posé le fondement [it has not laid the ground itself].
.il repose dans la gravité de ce fondement [it rests in the weight of it].
.le fondement, sa gravité, est rendu manifeste par la tonalité comme charge [mood reveals to it as a burden].

.comment le Dasein est-il le fondement jeté [thrown ground]?
.en se projettant vers des possibilités où il est jeté.
.le soi-même doit poser le fondement de lui-même.
.il ne peut jamais se rendre maître de celui-ci.

.étant-fondement = existant comme jeté [being the ground = existing as thrown].
.le Dasein reste en deçà de ses possibilités.
.le Dasein n’est jamais existant avant son fondement.
.il est existant à partir du fondement et comme fondement.
.être-fondement = n’être jamais en possession de son être le plus propre = être une nullité de soi-même.
.ne-pas déterminé existentialement : étant soi-même, le Dasein est l’étant jeté en tant que soi-même.

Summary of page 286

• Sa positivité s’épuise-telle à constituer le passage (Übergang) [dialectique ?] ?
• La dialectique se réfugie dans la négation sans la fonder dialectiquement.
• Les conditions du problème portant sur l’origine ontologique de la néantité (Nichtheit) se trouvent dans la clarification du sens de l’être.

• Les concepts de privation, de défaut (Mangel) et du mal (Bösen) sont insuffisants pour interpréter ontologiquement le phénomène de la dette.
• Le bonum, sa privatio et l’idée de valeur (Wertes) tiennent leur commune origine de l’ontologie du sous-la-main.

• L’étant dont l’être est le souci est en-dette (schuldig) au fond de son être.
• Cet être-en-dette est la condition permettant que le Dasein devienne facticement endetté (schuldig), et la condition du bien et du mal moraux (moralisch).
• L’être-en-dette originaire ne peut être déterminé par la moralité, car celle-ci le présuppose déjà.

• Que l’être-en-dette originaire le plus souvent demeure non-ouvert (unerschlossen), cela ne fait que dévoiler (enthüllt) la nullité (Nichtigkeit) citée.
• L’être-en-dette est plus originaire que tout savoir (Wissen) le concernant.
• C’est parce que le Dasein est essentiellement en-dette que la conscience (Gewissen) est possible.
• L’appel donne cet être-en-dette à comprendre.

• L’appel est appel du souci, dont l’être est constitué par l’être-en-dette.
• Dans l’étrang(èr)eté, le Dasein se rassemble originairement avec lui-même.

Monday, August 23, 2010

Summary of page 285

• Si le Dasein est le fondement de son être, ce n’est pas parce que celui-ci provient d’un projet propre, mais c’est en tant qu’être-soi-même qu’il est l’être du fondement.
• Celui-ci est seulement fondement d’un étant dont l’être a à assumer l’être-fondement.

• Le Dasein est en existant son fondement : en se comprenant à partir de possibilités, il est l’étant jeté.
• Pouvant être (seinkönnend), il se tient à chaque fois dans une possibilité particulière et renonce aux autres.
• Le projet n’est pas seulement déterminé, en tant qu’à chaque fois jeté, par la nullité de l’être-fondement, mais, en tant que projet, il est essentiellement nul (nichtig).
• Loin de désigner la propriété ontique du sans succès (erfolglos), cette détermination désigne un constitutif existential du projeter.
• Cette nullité appartient à l’être-libre du Dasein pour ses possibilités existentielles.
• La liberté n’est que dans le choix de l’une, i.e. dans l’assomption du n’avoir-pas-choisi d’autres.

• Dans la structure de l’être-jeté et dans celle du projet est contenue une nullité, laquelle est le fondement de la possibilité de la nullité du Dasein inauthentique dans l’échéance.
Le souci est transi de part en part de nullité.
• Le souci signifie, en tant que projet jeté, l’être-fondement (nul) d’une nullité ; i.e. le Dasein est en-dette, si tant est que demeure la détermination de la dette comme être-fondement d’une nullité.

• La nullité existentiale n’a pas le caractère d’un défaut (Mangel) par rapport à un idéal.
• L’être du Dasein est, avant tout ce qu’il peut projeter, déjà nul (nichtig) en tant que projeter.

• Tant le sens ontologique de la néantité (Nichtheit) de cette nullité (Nichtigkeit) existentiale que l’essence ontologique du ne-pas (Nicht) en général restent obscurs.
• Est-il évident que tout ne-pas signifie un défaut (Mangel) ?

Sunday, August 22, 2010

Summary of page 284

• Le fondement n’a pas besoin de tenir sa nullité de ce qu’il fonde.
L’être-en-dette ne résulte pas d’un endettement (Verschuldung). Celui-ci devient possible sur le fondement d’un être-en-dette originaire.

• L’être du Dasein est le souci.
• Il comprend la facticité (être-jeté), l’existence (projet) et l’échéance.
• Étant, le Dasein est jeté (i.e. il n’est pas porté à son là par lui-même) et déterminé comme un pouvoir-être qui s’appartient à lui-même.
• Existant, le Dasein ne passe jamais derrière son être-jeté.
• L’être-jeté ne se trouve pas derrière lui comme un événement factuellement arrivé, mais le Dasein est en tant que souci son que (Daβ).
• C’est en tant que cet étant, qu’il est, en existant, le fondement de son pouvoir-être.
• Il repose dans sa gravité (Schwere), que la tonalité comme charge (Last) lui rend manifeste.

• Il est ce fondement jeté (geworfene Grund) de telle manière qu’il se projette vers des possibilités où il est jeté.
• Le soi-même qui a à poser le fondement de lui-même ne peut jamais se rendre maître de celui-ci, et pourtant, en existant, il a à assumer l’être-fondement.
• Être son propre fondement jeté, tel est le pouvoir-être dont il y va pour le souci.

• Étant-fondement (Grund-seiend), i.e. existant comme jeté, le Dasein reste en deçà de ses possibilités.
• Il n’est jamais existant avant son fondement, mais à partir de lui et comme tel.
• Être-fondement signifie n’être jamais en possession de son être le plus propre.
• Étant-fondement, il est lui-même une nullité (Nichtigkeit) de lui-même.
• La nullité ne signifie pas le ne-pas-être-sous-la-main, la non-subsistance, mais un ne-pas qui constitue l’être-jeté du Dasein.
• Etant soi-même, le Dasein est l’étant jeté en tant que Soi-même, dé-laissé (entlassen) non pas par soi-même, mais à (an) soi-même à partir du fondement, pour être comme tel.

Friday, August 20, 2010

Summary of page 283

• Le en-dette (schuldig) s’en trouve ainsi refoulé dans le domaine de la préoccupation.

• Afin de clarifier le phénomène de la dette, qui n’est pas nécessairement lié à l’infraction au droit, il faut s’enquérir de l’être-en-dette (Schuldigsein) du Dasein en concevant l’idée du en-dette (schuldig) à partir du mode d’être propre du Dasein.

• L’idée du en-dette doit être formalisée jusqu’au degré requis pour que demeurent hors jeu (ausfallen) tant les phénomènes de dette vulgaires de la préoccupation calculatrice que tout rapport à un devoir et à une loi.

• Car ici encore, la dette est déterminée comme défaut (Mangel), comme le manque (Fehlen) de quelque chose qui doit être.
• Mais manquer signifie ne-pas-être-sous-la-main.
• Rien ne peut manquer à l’existence, car son caractère d’être demeure différent de tout sous-la-main.

• Néanmoins, il y a dans l’idée du en-dette le caractère du ne-pas (Nicht).
• De plus, à cette idée appartient le fait d’être fondement, cause de... (Grundsein für…).
• L’idée formellement existentiale du en-dette est : être-fondement pour un être déterminé par un ne-pas, i.e. être fondement d’une nullité (Grundsein einer Nichtigkeit).
• Si une telle idée du ne-pas exclut la relativité à un sous-la-main, alors disparaît la possibilité de considérer l’étant qui est un tel fondement comme déficient (mangelhaft).
• Il est impossible, partant d’un défaut causé (verursachten) par le Dasein, d’inférer la déficience de la cause (Ursache).

Thursday, August 19, 2010

Help

...besoin d'aide pour comprendre la page 284... :(

Wednesday, August 18, 2010

Summary of page 282

• L’être-en-dette est ainsi rapporté à de l’étant dont on peut se préoccuper (Besorgbares).

• Être-en-dette offre la deuxième signification d’être responsable de (schuld sein an).
• Suivant ce sens, on peut être en dette sans être débiteur envers autrui ou bien on peut devoir quelque chose à autrui sans soi-même en être responsable

• Ces significations vulgaires de l’être-en-dette peuvent déterminer un comportement que nous nommons se mettre en dette (sich schuldig machen), i.e. léser un droit (relatif à une propriété ou à l’être-l’un-avec-l’autre public) et se rendre passible d’une peine.
• Le se-mettre-en-dette peut avoir aussi le caractère d’un devenir-endette envers autrui (Schuldigwerdens an Anderen), lequel ne relève pas d’une entorse au droit, mais du fait que je suis responsable de ce que l’autre est mis en péril – être le fondement (Grundsein) d’un manque (Mangel) dans le Dasein d’un autre –.
• Cette déficience (Mangelhaftigkeit) est le manquement (Ungenügen) vis-à-vis d’une exigence qui s’applique à l’être-avec existant avec autrui.

• L’être-en-dette (Schuldigsein), en tant qu’entorse à une exigence éthique (sittlichen Forderung), est un mode d’être du Dasein.
• Autant vaut aussi de l’être-en-dette au sens de se rendre passible d’une peine (sich strafbar machen), d’avoir des dettes (Schulden haben), et de toute responsabilité dans... (Schuldhaben an…).
• La caractérisation selon laquelle le fait d’être chargé d’une dette éthique (beladen mit sittlicher Schuld) est une qualité du Dasein ne suffit pas pour le délimiter ontologiquement par rapport aux conduites citées.
• Le concept de dette éthique n’est pas clarifié lorsqu’on interprète le phénomène en incluant dans son concept l’idée de culpabilité ou d’endettement auprès...

Ce quelque chose n'est rien qu'un manque

Lacan, La relation d’objet (Séminaire IV)

.toute façon pour l’homme de trouver l’objet est, et n’est jamais que, la suite d’une tendance où il s’agit d’un objet perdu, d’un objet à retrouver (15).
.objet qui a d’abord été le point d’attache des premières satisfactions de l’enfant (15).
.un ressort des plus essentiels de l’expérience analytique, c’est la notion du manque de l’objet (35).

.manque de l’objet :
≠ négatif (36).
= ressort même de la relation du sujet au monde (36).

.la relation centrale d’objet, celle qui est dynamiquement créatrice, est celle du manque (51).
.le manque d’objet constitue proprement la voie humaine, celle de la réalisation du rapport de l’homme à son existence, en tant que celle-ci peut-être mise en cause (85) (> mort).
.permanence du caractère constituant d’un au-delà de l’objet (151).
.tout ce qui peut se transmettre dans l’échange symbolique est toujours quelque chose qui est autant absence que présence (152).
.Harfner & Mignon : puissance incarnée à l’état massif et ce sans quoi celle-ci est dépourvue d’efficacité, le secret de sa véritable puissance. Ce qqchose n’est rien qu’un manque (168).
.aucune satisfaction par un objet réel quelconque qui vient s’y substituer, ne parvient jamais à combler le manque dans la mère (177).

Tuesday, August 17, 2010

Manque

A-portée-de-la-main et sous-la-main
[73] […] l’usage préoccupé […] rencontre aussi de l’étant qui fait défaut — qui non seulement n’est pas « maniable », mais encore n’est absolument pas « à main ». En tant que découverte d’un non-à-portée-de-la-main, un constat d’absence de cette sorte découvre du même coup l’à-portée-de-la-main dans un certain être-sans-plus-sous-la-main. Dans cette remarque de son non-à-portée-de-la-main, l’étant à-portée-de-la-main revêt le mode de l’insistance. Plus le besoin de ce qui fait défaut se fait sentir de façon pressante, plus proprement il est rencontré dans son ne-pas-être-à-portée-de-la-main, et d’autant plus insistant devient l’étant à-portée-de-la-main, au point même de sembler perdre le caractère de l’être-à-portée-de-la-main. Il se dévoile comme sans-plus-sous-la-main, dont il n’y a rien à faire sans ce qui manque. Le désarroi, en tant que mode déficient d’une préoccupation, découvre l’être-sans-plus-sous-la-main d’un étant à-portée-de-la-main.
[75] […] le manque d’un étant à-portée-de-la-main, dont la présence quotidienne était si « évidente» que nous n’en avions même pas fait la remarque, est une rupture des complexes de renvois découverts dans la circon-spection. La circon-spection se heurte au vide et voit maintenant seulement ce pour quoi et avec quoi ce qui manque était à-portée-de-la-main.


Etre-avec
[120] Même l’être-seul du Dasein est être-avec dans le monde. L’autre ne peut manquer que dans et pour un être-avec.
[121] Le manque, le « départ » sont des modes de l’être-Là-avec, ils ne sont possibles que parce que le Dasein comme être-avec laisse le Dasein d’autrui faire encontre en son monde.


Dasein
[243] […] le ne-pas-encore appartenant au Dasein ne demeure pas seulement inaccessible provisoirement et temporairement à l’expérience propre et étrangère [la lune] : il n’« est » absolument pas encore « effectif ».
[244] Le ne-pas-encore, ici [le fruit immature], est déjà impliqué dans son être propre, et cela non point en tant que détermination quelconque, mais en tant que constituant. De manière correspondante, le Dasein, aussi longtemps qu’il est, est lui aussi à chaque fois déjà son ne-pas-encore.
Ce qui constitue pour le Dasein sa « non-totalité », l’en-avant-de-soi constant, n’est ni l’excédent d’un ensemble sommatif, ni même un ne-pas-encore-être-devenu-accessible, mais un ne-pas-encore qu’un Dasein, en tant que l’étant qu’il est, a à chaque fois à être. Néanmoins la comparaison avec l’immaturité du fruit, en dépit d’une certaine convergence, manifeste des différences essentielles.
[283] manquer signifie ne-pas-être-sous-la-main. Le défaut comme ne-pas-être-sous-la-main d’une chose due est une détermination d’être du sous-la-main. En ce sens, rien ne peut manquer essentiellement à l’existence, non point parce qu’elle serait parfaite, mais parce que son caractère d’être demeure différent de tout sous-la-main.

Résumé p.283 [dette vs. manque]

.le concept de dette (faute) n’est pas clarifié par son explicitation en termes de cupabilité, d’endettement.
.le en-dette s’en trouve refoulé dans le domaine de la préoccupation.

.la clarification du phénomène de la dette n’est pas nécessairement liée au débit et à l’infraction au droit.
.elle ne peut réussir que si on s’enquiert de l’être-en-dette du Dasein, cad si l’en-dette est conçue à partir du mode d’être du Dasein.

.l’idée du « en-dette » doit être formalisée afin de mettre hors jeu les phénomènes vulgaires relatifs à l’être-avec préoccupé avec autrui.
.l’idée de dette doit être :
..haussée au-dessus du domaine de la préoccupation calculatrice.
..dégagée de tout rapport à un devoir et à une loi.

.dette ≠ défaut, comme le manque de qqchose qui doit et qui peut être.
.manque : ne-pas-être-sous-la-main.
.défaut : ne-pas-être-sous-la-main d’une chose due, détermination d’être du sous-la-main.

.rien ne peut manquer essentiellement à l’existence.
.pas parce qu’elle serait parfaite.
.parce que son caractère d’être demeure différent de tout sous-la-main.

.il y a dans l’idée du « en-dette » le caractère du ne-pas [Nicht].

.idée formellement existentiale du « en-dette » : être-fondement pour un être déterminé par un ne-pas – être fondement d’une nullité [Nichtigkeit].

.impossibilité de considérer comme déficient l’étant qui est fondement d’un défaut.
.partant d’un défaut causé par le Dasein ou du non-remplissement d’une exigence, impossible d’inférer rétrospectivement la déficience de la cause.

Monday, August 16, 2010

Summary of page 281

• Même si le sens de cet être-en-dette (Schuldigseins) se laissait saisir, son concept existential n’en demeurerait pas moins obscur.
• L’idée de dette doit être puisée dans une interprétation de l’être du Dasein.
Qui dit comment nous sommes en dette et ce que dette signifie ?
• Toutes les recherches ontologiques sur des phénomènes comme la dette, la conscience, la mort doivent prendre leur point de départ dans ce qu’en dit l’explicitation quotidienne du Dasein.
• Le mode d’être échéant du Dasein implique que son interprétation est orientée inauthentiquement.
• Néanmoins, dans toute erreur de vision se dévoile une indication en direction de l’idée originaire du phénomène.
• Ce en-dette surgit comme prédicat du je suis.
• Est-ce que ce qui est compris comme dette dans une interprétation inauthentique se trouve dans l’être du Dasein de telle manière que celui-ci, pour autant qu’il existe facticement, soit déjà en dette ?

• Il faut conceptualiser le contenu de l’appel pour que puisse être compris ce que veut dire ce en-dette qui est crié.

• L’entente (Verständigkeit) quotidienne prend l’être-en-dette (Schuldigsein) au sens d’être débiteur (schulden) : on doit restituer à l’autre quelque chose auquel il prétend.
• Cet être-en-dette au sens d’avoir des dettes est une guise de l’être-avec autrui dans le domaine de la préoccupation.

Résumé p.282

.être-en-dette comme être responsable de, être la cause de.

.avoir des dettes + être responsable de = significations vulgaires de l’être-en-dette.
.peuvent converger et déterminer le comportement de « se mettre en dette » : léser un droit en étant responsable d’avoir des dettes.

.devenir en dette envers autrui : je suis responsable de ce que l’autre est mis en péril, égaré, ou brisé dans son existence.
.être le fondement d’un manque dans le Dasein d’un autre.
.déficience, manquement vis-à-vis d’une exigence qui s’applique à l’être-avec existant avec autrui.

.laisse de côté comment de telles exigences prennent naissance et comment leur caractère d’exigence et de loi doit être conçu.

.l’être-en-dette au sens de
..exigence éthique
..se rendre passible d’une peine
..avoir des dettes
..être responsable
.sont des modes d’être du Dasein.

.cette caractérisation ne suffit pas pour délimiter ontologiquement ce mode de « déterminité d’être » du Dasein.

Summary of page 280

• Toutes les expériences et toutes les interprétations de la conscience s’accordent sur ce point : la « voix » de la conscience parle d’une « dette » (Schuld).

§ 58. Compréhension de l’ad-vocation et dette.

• L’ad-voquer signifie une con-vocation du Soi-même le plus propre à son pouvoir-être en tant qu’être-au-monde préoccupé et être-avec.
• L’interprétation existentiale de ce à quoi l’appel con-voque ne délimite pas une possibilité concrète singulière d’existence.
• Ce qui peut être fixé ce n’est pas ce qui à chaque fois est existentiellement crié, mais ce qui appartient à la condition existentiale de possibilité du pouvoir-être factice.

• La compréhension de l’appel est d’autant plus authentique que le Dasein entend de façon plus intransférable (unbezüglicher) son être-ad-voqué, et quand ce qu’on dit falloir pervertit moins le sens de l’appel.

• L’appel ne dit rien qui serait à discuter, il ne donne aucune connaissance sur des événements (Begebenheiten).
• L’appel pro-voque (aufweisen) le Dasein vers son pouvoir-être en tant qu’appel venu de l’étrang(èr)eté.
• Le « d’où » de l’appeler, l’étrang(èr)eté de l’isolement jeté, est co-ouvert dans l’appeler.
• L’appel ne donne nul pouvoir-être idéal, universel à comprendre, mais plutôt le pouvoir-être isolé de chaque Dasein.
• Le caractère d’ouverture de l’appel n’est déterminé que si on le comprend comme rappel pro-vocant (vorrufenden Rückruf).

• Toutefois, ne répond-on à la question de savoir ce que l’appel dit en invoquant le fait que, dans toutes les expériences de conscience, l’appel advoque le Dasein en tant que coupable ?

Résumé p.281

.l’idée de dette ne saurait être puisée ailleurs que dans une interprétation de l’être du Dasein.
.qui dit comment nous sommes en dette et ce que dette signifie ?
.comment trouver la trace qui puisse nous conduire au dévoilement du phénomène ?

.toutes les recherches ontologiques sur la dette, la conscience, la mort, doivent nécessairement prendre leur point de départ dans ce qu’en « dit » l’explicitation quotidienne du Dasein.
.mais le mode d’être échéant du Dasein implique que son explicitation est le plus souvent orientée inauthentiquement.
.dans toute erreur de vision se dévoile en même temps une indication en direction de l’idée originaire du phénomène.

.le « en-dette » surgit comme prédicat du « je suis ».

.l’entente quotidienne prend le « être-en-dette » au sens de « être débiteur », « avoir des dettes ».
.guise de l’être-avec autrui dans le domaine de la préoccupation.
.ne pas satisfaire à la revendication de propriété des autres.
.l’être-en-dette en ce sens est rapporté à de l’étant dont on peut se préoccuper.

Saturday, August 14, 2010

Résumé p.280 [surmoi]

§58 Compréhension de l’ad-vocation et dette

.l’ad-voquer du On-même = con-vocation du Soi-même à son pouvoir-être en tant qu’être-au-monde préoccupé et être-avec avec les autres.

.ce qui peut et demande à être fixé par l’interprétation existentiale de ce à quoi l’appel con-voque :
..ce n’est pas ce qui est crié existentiellement dans chaque Dasein.
.. c’est la condition existentiale de possibilité du pouvoir-être factice-existentiel.

.la compréhension existentiellement entendante de l’appel est authentique :
..quand le Dasein entend et comprend son être-ad-voqué.
..quand ce qu’on dit convenir et falloir pervertit moins le sens de l’appel.

.l’appel vient de l’étrang(èr)eté de l’isolement jeté.
.ce lieu, l’étrang(èr)eté, est co-ouvert dans l’appeler.
.le « d’où » de l’appeler est le « vers où » du rappeler.

.l’appel ne donne nul pouvoir-être idéal, universel à comprendre.
.l’appel ouvre le pouvoir-être isolé de chaque Dasein.
.caractère d’ouverture de l’appel = rappel pro-vocant.

.ce qui est constamment entendu – ou non-entendu – dans toutes les expériences de la conscience : l’appel advoque le Dasein en tant que « coupable » : renvoie à une « dette » possible ou sa « liquidation ».

Friday, August 13, 2010

Le Dasein et la Fenêtre...

« […] l’exister humain n’est jamais seulement, en son fond essentiel, un objet subsistant quelque part, pas plus qu’il n’est un objet claustré sur soi. Il consiste plutôt, cet exister, en possibilités d’appréhension orientées sur ce qui vient à sa rencontre en s’adressant à lui […] »
Heidegger, Séminaires de Zurich, Séminaire du 8 Septembre 1959. pp.31-2.

« L’espace est donc translucide pour l’apparition de la table, il est ouvert, libre. […] La spatialité de cet espace consiste donc dans la translucidité, l’ouverture, dans le libre. En revanche, l’ouverture n’est elle-même rien de spatial. Le « à travers », à travers quoi quelque chose apparait et se montre selon sa modalité, c’est cela l’ouvert, le libre. Dans cet ouvert, nous nous y trouvons et nous nous y portons, mais tout autrement que la table. […] Il [le Dasein] se trouve en cet espace. […] Nous sommes absorbés par l’espace dans lequel nous nous rapportons à ceci et cela. En revanche, la table « ne se trouve » pas dans l’espace.
L’ouvert, le libre, le transparaissant ne repose pas sur le spatial ; au contraire, c’est le spatial qui, à l’inverse, repose sur l’ouvert et le libre. »
Heidegger, Séminaires de Zurich, Séminaire des 24 et 28 janvier 1964. p.37.

En ce qui concerne la « fenêtre peinte », il y aurait à demander : qu’est-ce qu’une fenêtre ? Son cadre délimite l’ouvert du transparaître (Durchscheinen) pour, grâce à la limite, le rassembler dans une délivrance du paraître (in eine Freigabe des Scheinens). La fenêtre, en tant qu’elle laisse entrer le paraître en son approche, est regard jeté au-dehors vers ce qui advient (Ausblick in die Ankunft). »
Heidegger, Sur La Madone Sixtine, 1955 (dans : Ph. Lacoue-Labarthe, La Vraie Semblance, Galilée, 2008, pp24-5).

Madone Sixtine, Raphaël, 1514.

Summary of page 279

• On pourrait opposer à notre interprétation de la conscience comme appel du souci les contre-questions suivantes :
• La conscience comme con-vocatrice (Aufrufer) parle-t-elle avec cette indétermination vide d’un pouvoir-être authentique, et non pas plutôt, de façon concrète, des fautes que l’on peut commettre ?
• L’ad-vocation provient-elle de la « mauvaise » conscience, ou de la « bonne » ?
• La conscience livre-t-elle quelque chose de positif, ou ne fonctionne que de manière critique ?

• D’une interprétation de la conscience, il est permis d’exiger que l’on y reconnaisse le phénomène tel qu’il est quotidiennement expérimenté.
• Jusqu’à maintenant, on a reconduit la conscience en tant que phénomène du Dasein à la constitution ontologique de cet étant afin de préparer notre tâche proprement dite : rendre intelligible la conscience comme une attestation, située dans le Dasein lui-même, de son pouvoir-être le plus propre.

• Le comprendre authentique n’est pas un supplément qui s’annexerait de façon contingente au phénomène de la conscience.
• C’est seulement à partir de la compréhension de l’ad-vocation que le vécu plein de la conscience (volle Gewissenserlebnis) se laisse saisir.
• Si c’est le Dasein propre qui est et l’appelant et l’ad-voqué, alors il y a dans toute mésentente (Überhören) de l’appel un mode d’être déterminé du Dasein.
• Un appel flottant en l’air (freischwebender) dont rien ne résulterait est une fiction impossible.

• Seule l’analyse de la compréhension de l’ad-vocation permet d’élucider ce que l’appel donne à comprendre et de concevoir existentialement la dette (schuldig) qui est criée dans la conscience.

On

« Je n’étais pas seul, j’étais un homme quelconque. »

Maurice Blanchot, Le Très-haut, 1948. Première phrase.

Tenir-ouvert

« Ce dessin doit seulement restituer avec netteté que l’exister humain n’est jamais seulement, en son fond essentiel, un objet subsistant quelque part, pas plus qu’il n’est un objet claustré sur soi. Il consiste plutôt, cet exister, en possibilités d’appréhension orientées sur ce qui vient à sa rencontre en s’adressant à lui […]. Exister en tant qu'être-le-là signifie [...] tenir-ouvert un domaine [...] »
Heidegger, Séminaires de Zurich, Séminaire du 8 Septembre 1959. pp31-2.

Wednesday, August 4, 2010

Sur le concept d'Histoire (W. Benjamin & L. Anderson)

The Dream Before, Laurie Anderson

Hansel and Gretel are alive and well
And they're living in Berlin
She is a cocktail waitress
He had a part in a Fassbinder film
And they sit around at night now drinking schnapps and gin
And she says: Hansel, you're really bringing me down
And he says: Gretel, you can really be a bitch
He says: I've wated my life on our stupid legend When my one and only love was the wicked witch. She said: What is history?
And he said: History is an angel being blown backwards into the future
He said: History is a pile of debris
And the angel wants to go back and fix things
To repair the things that have been broken
But there is a storm blowing from Paradise
And the storm keeps blowing the angel backwards into the future
And this storm, this storm is called Progress


Sur le concept d'Histoire, Thèse IX, Walter Benjamin

Mon aile est prête à l’envol,
Je voudrais revenir.
Si je restais un temps sans fin
Je n’aurais que peu de chance.

Gerherd Scholem, “Gruss vom Angelus”

Il existe un tableau de Klee qui s’intitule « Angelus Novus ». Il représente un ange qui semble sur le point de s’éloigner de quelque chose qu’il fixe du regard. Ses yeux sont écarquillés, sa bouche ouverte, ses ailes déployées. C’est à celà que doit ressembler l’Ange de l’Histoire. Son visage est tourné vers le passé. Là où nous apparaît une chaîne d’évènements, il ne voit, lui, qu’une seule et unique catastrophe, qui sans cesse amoncelle ruines sur ruines et les précipite à ses pieds. Il voudrait bien s’attarder, réveiller les morts et rassembler ce qui a été démembré. Mais du paradis souffle une tempête qui s’est prise dans ses ailes, si violemment que l’ange ne peut plus les refermer. Cette tempête le pousse irrésistiblement vers l’avenir auquel il tourne le dos, tandis que le monceau de ruines devant lui s’élève jusqu’au ciel. Cette tempête est ce que nous appelons le progrès.

Über den Begriff der Geschichte, These IX, Walter Benjamin


Mein Flügel ist zum Schwung bereit,
ich kehrte gern zurück,
denn blieb ich auch lebendige Zeit,
ich hätte wenig Glück.

Gerherd Scholem, “Gruss vom Angelus”

Es gibt ein Bild von Klee, das Angelus Novus heißt. Ein Engel ist darauf dargestellt, der aussieht, als wäre er im Begriff, sich von etwas zu entfernen, worauf er starrt. Seine Augen sind aufgerissen, sein Mund steht offen und seine Flügel sind ausgespannt. Der Engel der Geschichte muß so aussehen. Er hat das Antlitz der Vergangenheit zugewendet. Wo eine Kette von Begebenheiten vor uns erscheint, da sieht er eine einzige Katastrophe, die unablässig Trümmer auf Trümmer häuft und sie ihm vor die Füße schleudert. Er möchte wohl verweilen, die Toten wecken und das Zerschlagene zusammenfügen. Aber ein Sturm weht vom Paradiese her, der sich in seinen Flügeln verfangen hat und so stark ist, daß der Engel sie nicht mehr schließen kann. Dieser Sturm treibt ihn unaufhaltsam in die Zukunft, der er den Rücken kehrt, während der Trümmerhaufen vor ihm zum Himmel wächst. Das, was wir den Fortschritt nennen, ist dieser Sturm.

Summary of page 278

• Il n’est besoin d’aucun recours à des puissances étrangères à l’être du Dasein, car un tel recours anéantit l’étrang(èr)eté de l’appel.
• Pourquoi s’adresser à des puissances étrangères tant que l’on ne s’est pas assuré que l’on n’avait pas apprécié trop bas l’être du Dasein, i.e. comme un sujet anodin (harmloses) muni d’une conscience personnelle ?

• Il semble que l’interprétation de l’appelant comme une puissance permet de reconnaître une donnée objectivement trouvable (objectiv Vorfinflichen).
• Pourtant, cette interprétation est une fuite du Dasein devant la conscience par laquelle il se glisse derrière l’étroite paroi qui sépare le On de l’étrang(èr)eté de son être.
• Une telle interprétation de la conscience prétend reconnaître l’appel comme une voix obligeante élevée au rang d’une conscience universelle (Weltgewissen) qui est un ça (es) et personne, et qui ne parle pas simplement de manière subjective.

• Mais qu’est-ce que cette conscience publique (öffentliche) d’autre que la voix du On ?
• Le Dasein ne peut en arriver à l’invention d’une conscience universelle que parce que la conscience est essentiellement mienne, car 1) c’est à chaque fois le pouvoir-être le plus propre qui est ad-voqué, et 2) l’appel vient de l’étant que je suis à chaque fois moi-même.

• L’interprétation précédente de l’appelant, loin de rendre purement subjective la puissance (Macht) de la conscience, libère l’inexorabilité (Unerbittlichkeit) et l’univocité (Eindeutigkeit) de l’appel.
• L’objectivité de l’ad-vocation n’obtient son droit que si l’interprétation lui laisse sa subjectivité, laquelle refuse la souveraineté au On.

Tuesday, August 3, 2010

Authenticité vs. Propriété Privée


The Soul of Man under Socialism, Oscar Wilde, 1891, pdf.

Monday, August 2, 2010

First as Tragedy, Then as Farce - Slavoj Zizek


Capitalisme Culturel. Zizek. [pdf]

it's at home in me

Odense (Dk) 09.2006.

"Poetry, creative literature, is nothing but the elementary emergence into [172] words, the becoming-uncovered, of existence as being-in-the-world. For the others who before it were blind, the world first becomes visible by what is thus spoken. We may listen to a quotation from Rainer Maria Rilke’s The Notebooks of Malte Laurids Brigge as testimony on this point [German original text below].

Will anyone believe that there are such houses? No. they will say that I’m falsifying. But this time it's the truth, nothing left out and naturally also nothing added. Where should I get it from? It's well known that I’m poor. Everyone knows. Houses? But, to be precise, they were houses that no longer existed. Houses that were torn down from top to bottom. What was there was the other houses, the ones that had stood alongside them, tall neighboring houses. They were obviously in danger of collapsing after everything next to them had been removed, for a whole framework of long tarred poIes was rammed aslant between the ground of the rubble-strewn lot and the exposed wall. I don't know whether I've already said that I mean this wall. But it was, so to speak, not the first wall of the present houses (which nevertheless had to be assumed) but the last one of the earlier ones. You could see their inner side. You could see the walls of rooms on the different storeys, to which the wallpaper was still attached, and here and there the place where the floor or ceiling began. Along the whole wall, next to the walls of the rooms, there still remained a dirty-white area, and the open rust-stained furrow of the toiIet pipe crept through it in unspeakably nauseating movements, soft, like those of a digesting worm. Of the paths taken by the illuminating gas, gray dusty traces were left at the edges of the ceilings, and here and there, quite unexpectedly, they bent round about and came running into the colored wall and into a black hole that had been ruthlessly ripped out. But most unforgettable were the walls themselves. The tenacious life of these rooms refused to let itself be trampled down. It was still there; it clung to the nails that had remained; it stood on the handsbreadth remnant of the floor; it had crept together there among the onsets of the corners where there was still a tiny bit of interior space. You could see that it was in the paint, which it had changed slowly year by year: from blue to an unpleasant green, from green to gray, and from yellow to an old decayed white that was now rotting away. But it was also in the fresher places that had been preserved behind mirrors, pictures and cupboards; for it had drawn and redrawn their contours and had also been in these hidden places, with the spiders and the dust, which now lay bare. It was in every streak that had been trashed off; it was in the moist blisters at the lower edge of the wall-hangings; it tossed in the torn-off tatters, and it sweated out of all the ugly stains that had been made so long ago. And from these walls, once blue, green, and yellow, which were framed by the tracks of the fractures of the intervening walls that had been destroyed, the breath of this life stood out, the tough, sluggish, musty breath which no wind had yet dispersed. There stood the noondays and the illnesses, and the expirings and the smoke of years and the sweat that breaks out under the armpits and makes the clothes heavy, and the stale breath of the mouths and the fusel-oil smell of fermenting feet. There stood the pungency of urine and [173] the burning of soot and the gray reek of potatoes and the strong oily stench of decaying grease. The sweet lingering aroma of neglected suckling infants was there and the anguished odor of children going to school and the sultriness from beds of pubescent boys. And much had joined this company, coming from below, evaporating upward from the abyss of the streets, and much else had seeped down with the rain, unclean above the towns. And the domestic winds, weak and grown tame, which stay always in the same street, had brought much along with them, and there was much more too coming from no one knows where. But I've said, haven't I, that all the walls had been broken off, up to this last one? Well, I've been talking all along about this wall. You'll say that I stood in front of it for a long time; but I'll take an oath that I began to run as soon as I recognized the wall. For that's what's terrible – that I recognized it. I recognize all of it here, and that's why it goes right into me: it's at home in me.

Notice here in how elemental a way the world, being-in-the-world – Rilke calls it life – leaps toward us from the things. What Rilke reads here in his sentences from the exposed wall is not imagined into the wall, but, quite to the contrary, the description is possible only as an interpretation and elucidation of what is "actually" in this wall, which leaps forth from it in our natural comportmental relationship to it. Not only is the writer able to see this original world, even though it has been unconsidered and not at all theoretically discovered, but Rilke also understands the philosophical content of the concept of life, which Dilthey had already surmised and which we have formulated with the aid of the concept of existence as being-in-the-world."

Heidegger, The Basic Problems of Phenomenology (1927).



Rainer Maria Rilke


Die Aufzeichnungendes Malte Laurids Brigge

[749] Wird man es glauben, daß es solche Häuser giebt? Nein, man wird sagen, ich fälsche. Diesmal ist es Wahrheit, nichts weggelassen, natürlich auch nichts hinzugetan. Woher sollte ich es nehmen? Man weiß, daß ich arm bin. Man weiß es. Häuser? Aber, um genau zu sein, es waren Häuser, die nicht mehr da waren. Häuser, die man abgebrochen hatte von oben bis unten. Was da war, das waren die anderen Häuser, die danebengestanden hatten, hohe Nachbarhäuser. Offenbar waren sie in Gefahr, umzufallen, seit man nebenan alles weggenommen hatte; denn ein ganzes Gerüst von langen, geteerten Mastbäumen war schräg zwischen den Grund des Schuttplatzes und die bloßgelegte Mauer gerammt. Ich weiß nicht, ob ich schon gesagt habe, daß ich diese Mauer meine. Aber es war sozusagen nicht die erste Mauer der vorhandenen Häuser (was man doch hätte annehmen müssen), sondern die letzte der früheren. Man sah ihre Innenseite. Man sah in den verschiedenen Stockwerken Zimmerwände, an denen noch die Tapeten klebten, da und dort den Ansatz des Fußbodens oder der Decke. Neben den Zimmerwänden blieb die ganze Mauer entlang noch ein schmutzigweißer Raum, und durch diesen kroch in unsäglich widerlichen, wurmweichen, gleichsam verdauenden Bewegungen die offene, rostfleckige Rinne der Abortröhre. Von den Wegen, die das Leuchtgas gegangen war, waren graue, staubige Spuren am Rande der Decken geblieben, und sie bogen da und dort, ganz unerwartet, rund um und kamen in die farbige Wand hineingelaufen und in ein Loch hinein, das schwarz und [750] rücksichtslos ausgerissen war. Am unvergeßlichsten aber waren die Wände selbst. Das zähe Leben dieser Zimmer hatte sich nicht zertreten lassen. Es war noch da, es hielt sich an den Nägeln, die geblieben waren, es stand auf dem handbreiten Rest der Fußböden, es war unter den Ansätzen der Ecken, wo es noch ein klein wenig Innenraum gab, zusammengekrochen. Man konnte sehen, daß es in der Farbe war, die es langsam, Jahr um Jahr, verwandelt hatte: Blau in schimmliches Grün, Grün in Grau und Gelb in ein altes, abgestandenes Weiß, das fault. Aber es war auch in den frischeren Stellen, die sich hinter Spiegeln, Bildern und Schränken erhalten hatten; denn es hatte ihre Umrisse gezogen und nachgezogen und war mit Spinnen und Staub auch auf diesen versteckten Plätzen gewesen, die jetzt bloßlagen. Es war in jedem Streifen, der abgeschunden war, es war in den feuchten Blasen am unteren Rande der Tapeten, es schwankte in den abgerissenen Fetzen, und aus den garstigen Flecken, die vor langer Zeit entstanden waren, schwitzte es aus. Und aus diesen blau, grün und gelb gewesenen Wänden, die eingerahmt waren von den Bruchbahnen der zerstörten Zwischenmauern, stand die Luft dieser Leben heraus, die zähe, träge, stockige Luft, die kein Wind noch zerstreut hatte. Da standen die Mittage und die Krankheiten und das Ausgeatmete und der jahrealte Rauch und der Schweiß, der unter den Schultern ausbricht und die Kleider schwer macht, und das Fade aus den Munden und der Fuselgeruch gärender Füße. Da stand das Scharfe vom Urin und das Brennen vom Ruß und grauer [751] Kartoffeldunst und der schwere, glatte Gestank von alterndem Schmalze. Der süße, lange Geruch von vernachlässigten Säuglingen war da und der Angstgeruch der Kinder, die in die Schule gehen, und das Schwüle aus den Betten mannbarer Knaben. Und vieles hatte sich dazugesellt, was von unten gekommen war, aus dem Abgrund der Gasse, die verdunstete, und anderes war von oben herabgesickert mit dem Regen, der über den Städten nicht rein ist. Und manches hatten die schwachen, zahm gewordenen Hauswinde, die immer in derselben Straße bleiben, zugetragen, und es war noch vieles da, wovon man den Ursprung nicht wußte. Ich habe doch gesagt, daß man alle Mauern abgebrochen hatte bis auf die letzte –? Nun von dieser Mauer spreche ich fortwährend. Man wird sagen, ich hätte lange davorgestanden; aber ich will einen Eid geben dafür, daß ich zulaufen begann, sobald ich die Mauer erkannt hatte. Denn das ist das Schreckliche, daß ich sie erkannt habe. Ich erkenne das alles hier, und darum geht es so ohne weiteres in mich ein: es ist zu Hause in mir.