Wednesday, August 25, 2010

Marc Richir sur la p.284

Richir, M. (2004) Phantasia, imagination, affectivité. Phénoménolgie et anthropologie phénoménologique. Editions Jérôme Millon (pp.165-9)

L’appelant de l’appel est le Dasein dans son Unheimlichkeit, tel qu’il se trouve dans la situation de l’angoisse, comme pur et nu « que » dans le néant du monde. Le Dasein « à hauteur de mort », comme pouvoir-être transmué par le pouvoir-ne-pas être, en un soi qui aiguillonne, inquiète, dans l’appel, le soi factice toujours déjà jeté dans l’une ou l’autre possibilité factice d’exister.
Toujours déjà jeté, facticement, dans l’une ou l’autre de ses possibilités factices d’exister, le Dasein se trouve du même coup toujours en dette de lui-même, surplombé par lui-même en suspens dans sa possibilité la plus propre : c’est ce qu’atteste facticement, donc existentiellement, la structure de l’appel dans le Gewissen. Mais il reste à voir comment cela se fait existentialement, c’est-à-dire comment il est possible de « concevoir existentialement la dette ».
Nous commençons à toucher à la double ipséité du Dasein.
La facticité (l’être toujours déjà jeté au monde) lui appartient quoiqu’elle ne l’amène pas à son « là », c’est-à-dire à cette figure étrangère (unheimlich) de lui-même en tant que pouvoir-être suspendu « à hauteur de mort ».
Le Dasein ne peut jamais reprendre cette contingence (cet être-jeté) pour le conduire dans le « là » du Dasein, donc de lui-même en tant que pur pouvoir-être suspendu.
La détermination factice de l’existence n’est pas un évènement qui le fonderait, une sorte de passage à l’acte ayant eu lieu du pouvoir-être comme puissance, passage factuel, donc contingent. Il ne se passe rien dans le Dasein proprement dit. Il n’est que son « que », c’est-à-dire le pur fait de sa certitude factice d’exister, répondant à la certitude indéterminée de la mort. Soi factice de l’être-jeté ou du projet.
Un autre « soi » pointe l’oreille, avec l’introduction du fondement : le Dasein est aussi le fondement de son pouvoir-être, donc la racine ou le sol de sa positivité. Sol qui excède le soi factice pris dans son existence, et que celui-ci tire comme un fardeau qui l’alourdit.
Distinction entre le sens d’être comme exister (telle ou telle possibilité factice) et le sens d’être comme fondement. C’est dans le pur et simple fait d’exister (où il ne se passe rien) que le Dasein est le fondement de son pouvoir-être, et cela sans qu’il ne l’ait jamais posé, ce pourquoi le fondement est le fardeau de l’existence.
Le projet, c’est-à-dire les possibilités factices d’exister ne peuvent être que les possibilités déjà jetées, c’est-à-dire la contingence du contenu de l’exister. Il est donc impossible pour le Dasein de maîtriser ce qui est censé, comme pur pouvoir-être, être au fondement de ces possibilités factices d’exister. Il ne reste plus au Dasein qu’à assumer l’être-fondement qui lui échappe radicalement parce qu’il l’a toujours déjà précédé dans le jet (projet) des possibilités factices d’exister où il se reconnait facticement.
C’est en étant (toujours déjà) jeté (dans l’une ou l’autre possibilité factice d’exister) que le Dasein est (paradoxalement) fondement. C’est donc à la fois parce qu’il est toujours déjà jeté dans telle possibilité factice d’exister et parce que c’est de cette manière qu’il est fondement qu’il « reste en arrière » de ses possibilités factices d’exister qui, de la sorte, le précèdent toujours déjà. Dire que c’est de cette manière qu’il est son fondement, c’est dire qu’il ne peut pas être avant (et face à) lui, mais, chaque fois qu’il existe dans le jet de telle possibilité factice d’exister, à partir de lui en tant que le fondement de cette possibilité. Le Dasein ne peut donc jamais s’assurer de son fondement, toujours déjà passé dans telle ou telle possibilité factice d’exister, donc ne peut jamais être maître de son être le plus propre qui correspondrait à l’exister dans toutes les possibilités factices d’exister. L’exister factice vient toujours déjà trop tard.
S’il n’y a pas d’autre manière pour le Dasein d’être-fondement que l’exister factice (l’être-jeté) dans telle possibilité factice d’exister d’où le fondement comme être total se retire, le Dasein n’y est jamais que « néantité de soi-même ».
L’être du Dasein comme exister factice (existentiel), c’est-à-dire aussi l’être soi-même dans la certitude factice d’exister, est « être » comme « non-être » (mode négatif de l’être) du fondement. Nous somme au bord du non-sens puisque c’est par le retrait de l’être du fondement que, par une sorte de creusement pour le non-être ou le néant, le Dasein arrive à exister (à être) dans une sorte de réflexivité de soi (d’ipséité) du néant. Comme si l’exister n’était que de ne pas exister parce qu’il n’est jamais que l’exister d’un Autre (le fondement) qui lui échappe radicalement, et qui l’abandonne, le « délaisse » sur la plage du monde.
[plutôt : le fondement serait une vague qui se « délaisse » sur une plage du monde (particulière, contingente) pour exister facticement. L’exister ne serait que ce délaissement par lequel le fondement est autant qu’il n’est pas. dl].
Pour le fondement, la seule manière d’être est négative. C’est seulement dans l’être-soi du Dasein toujours déjà jeté dans telle ou telle possibilité factice d’exister qu’est le fondement, sur le mode de son retrait qui fait de cet être-soi une néantité de soi-même, dont le Dasein a pourtant à assumer la puissance corrosive.
Distinction entre exister et être que Heidegger subsume par la différence entre le factice-existentiel-ontique et l’ontologique-existential, ce dernier anéantissant le premier. L’être du fondement est tout dans son non-être actif au sein de l’existence factice.

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